Avis de Sécurité février 2021

Nouvelles du Comité de Sécurité

Par: Kaylyn Gervais, Coprésident du Comité

Bonjour à tous! J’espère que vous profitez de l’hiver.

J’aimerais commencer par une blague sur le coronavirus, mais il faudrait que j’attende deux semaines pour savoir si vous la comprenez! Alors parlons plutôt de sécurité en vol. Yééééé! (Honnêtement, j’aimerais mieux être au Chili.)

Malheureusement, comme beaucoup d’entre vous, j’ai pris la difficile décision de ne pas voyager cet hiver. A ceux qui sont assez audacieux pour se rendre sur une plage ensoleillée, tequila à la main (après avoir inscrit quelques heures de vol à votre carnet), envoyez vos photos! Pour le reste d’entre nous appréciant les conditions douces favorisant les “sleds” hivernales, nous avons la chance d’avoir du temps supplémentaire cette saison. Pourquoi ne pas en profiter? La vraie question est plutôt de savoir comment en profiter. Peut-être que reconsidérer votre approche de la sécurité du parapente et du deltaplane est une option, et peut-être que nous pouvons vous aider.

Le comité de sécurité de l’ACVL fait un résumé annuel de tous les formulaires d’incident / d’accident soumis sur le site Web de l’ACVL. Chaque année, au printemps, nous publions un récapitulatif. Comme vous pouvez l’imaginer ce travail demande un certain temps, et nous commençons donc habituellement l’examen à l’automne. En 2020, nous avons déjà remarqué deux tendances qui sont matière à réflexion : les arbrissages et les accidents à l’international seront fortement soulignés  au printemps. Restez à l’écoute. Dans l’intervalle, vous pouvez réfléchir à ces deux tendances à l’aide des trois éléments de discipline aéronautique : le perfectionnement des compétences des pilotes, l’utilisation de l’équipement adéquat et l’amélioration de la compréhension des phénomènes aérodynamiques inhérents à la pratique du parapente/deltaplane (pilote, équipement, environnement). Êtes-vous préparés?

Le comité de sécurité produira un rapport uniquement sur les pratiques exemplaires et les tendances de l’industrie que nous identifions grâce aux rapports qui nous sont soumis (ou les cas dont nous sommes informés par les autorités locales). Ces rapports sont traités comme des informations confidentielles (ils ne sont lus que par le comité de sécurité de l’ACVL, sauf si l’auteur nous donne la permission de le partager) et ils servent principalement à tirer des leçons et à prévenir les incidents futurs. Nous souhaitons rappeler à tous les pilotes que nous utilisons cette information avec soin et que nous faisons tout le nécessaire pour promouvoir une étiquette en matière de sécurité, tout en assurant la discrétion. Cette année, nous avons commencé à partager quelques résumés de rapports (les noms et les détails ont été retirés) avec nos instructeurs, afin que ces derniers puissent les utiliser en classe. Nous remercions sincèrement les auteurs de ces quatre cas de nous avoir permis de diffuser l’information à grande échelle. Nous croyons que les conversations à propos de scénarios actuels et réels aideront à créer un environnement de formation enrichissant.

La saison morte est souvent une occasion pour les pilotes d’effectuer de la formation en ligne, de la formation indépendante (il existe des ressources extraordinaires!), effectuer la mise au point du matériel et faire l’achat d’équipement. Nous aimons tous les équipements; à quand remonte la dernière fois que vous vous êtes occupé du vôtre?

Il y a plusieurs années où j’étais (tout comme de nombreux pilotes) dépassée par le simple fait de penser à inspecter mon parachute de secours. J’ai plutôt décidé de m’adresser à une école locale fantastique qui effectue une clinique sur les parachutes de secours chaque année. J’ai regardé, j’ai appris… et j’ai eu le vertige. Ensuite, j’ai mangé de la pizza, donc tout s’est arrangé. Je suis vraiment reconnaissante envers les instructeurs et bien d’autres personnes qui ont pris le temps de me faire comprendre l’importance d’entretenir son équipement. Connaissez-vous quelqu’un près de chez-vous qui organise ce genre de clinique? N’hésitez pas à vérifier sur le site de l’ACVL pour voir la liste à jour des instructeurs et écoles.

C’est notamment parce que j’ai participé à ce genre de cliniques que j’ai maintenant une routine annuelle. Je vérifie les lignes avec soin, j’inspecte attentivement chaque pièce d’équipement et je replie mon parachute de secours. Cette année, j’attends avec impatience de consacrer du temps additionnel à préparer tout mon équipement. Je réinvente mon cockpit d’instrumentation avec une nouvelle disposition et je passe pas mal de temps accrochée dans mon salon. Je vais être TRÈS bien préparée cette saison.

Ma découverte récente la plus intéressante est un cours de météorologie en ligne gratuit sur edX.org. Merci à Xcmag pour la recommandation.  Je lis religieusement les articles de Honza et j’ai le sentiment d’avoir encore tellement de choses à apprendre, et surtout à mettre en application. Je crois à l’apprentissage tout au long de notre vie et j’aimerais bien connaître vos ressources préférées. Au nom de Suzanne, coprésidente du comité de sécurité, je partage une de ses ressources préférées, soit une série de vidéos assez récentes de la Fédération française de vol libre. Vous pouvez les visionner ici :  https://federation.ffvl.fr/pages/securite-et-technique/tutos-facteurs-non-techniques.

Enfin, j’aimerais vous présenter une nouvelle section de ce bulletin. Après cet article, vous trouverez deux entrevues réalisées à l’aide d’une liste de questions (voir ci-dessous) que nous comptons réutiliser avec d’autres pilotes de notre communauté. Nous attendons vos suggestions. Qui devrions-nous interviewer la prochaine fois? Au cours des prochains mois, nous espérons mettre en lumière différents niveaux d’expérience et des pilotes en tout genre. Faites-moi parvenir vos suggestions (ou vos réponses aux questions) à safety@hpac.ca.

Je vous laisse, chers lecteurs et chères lectrices, avec cette question : Si vous deviez convaincre votre copilote préféré de ne lire qu’UN seul texte sur la sécurité en parapente (médias sociaux inclus!), quel serait-il et à quand remonte la dernière fois où vous l’avez lu? Faites-nous le savoir sur notre groupe Facebook, HPAC/ACVL Members.

Bonne saison de vol hivernal!

Kaylyn Gervais, au nom du comité de sécurité de l’ACVL

QUESTIONS D’ENTREVUE :

    • Biographie du pilote: Nom, site habituel, type de vol habituel, nombre d’heures, nombre de sites différents, équipe de soutien, motivation, objectif.
    • Quel est ton quasi-accident préféré, et comment a-t-il changé ton approche du vol libre?
    • Parle-moi de ta routine avant le décollage.
    • Que fais-tu pour améliorer tes connaissances? De qui apprends-tu? Lectures recommandées?
    • Parlons de SIV : qui, quoi, où?
    • Quel est le meilleur gadget que tu as découvert récemment et qui t’aide à maintenir ton niveau de conscience en vol?
    • Donne-nous un exemple de conseil pratique qui pourrait améliorer notre étiquette en matière de sécurité.
    • Quelle est la différence entre un bon pilote et un pilote exceptionnel?
    • Est-ce qu’il y a autre chose que tu voudrais partager?

Guy Herrington

Je vous présente Guy Herrington. Il partage son temps en passant trois saisons à Pemberton (C.-B.) et, en hiver, il organise (avec quelques invités chanceux) des tournées à Tenancingo del Degollado, au Mexique. Si vous connaissez Valle, ce site est situé de l’autre côté du volcan et offre des conditions très similaires, mais dans un petit village sans l’aspect touristique.

Comme la plupart des pilotes chevronnés, Guy a arrêté de compter ses heures de vol après en avoir accumulé quelques milliers, mais il vole toujours de 200 à 250 heures par année. Il se tient occupé avec les élèves de l’école Sea to Sky Paragliding, effectue de 100 à 300 vols en tandem par année et passe trois semaines à voler le long de la côte ouest vers le Mexique et en revenir (quand la pandémie le lui permet). « Ce n’est pas facile d’exploiter une école, dit-il. Chaque instructeur a besoin de quelques vols pour retrouver la magie ».  Il a repoussé les limites du vol de longue distance agressif, tant à Pemberton qu’ailleurs, mais il a récemment conclu que le bonheur se trouvait dans des vols de 2 à 2,5 heures en moyenne. « La passion évolue », avoue-t-il humblement, «de vols de longue distance très agressifs à l’observation de mes élèves et le partage de leurs réussites. »

L’équipe de soutien de Guy comprend sa communauté locale, Fly BC (Jim Reich), Paraglide Canada (Norm Krcmar) et Cayoosh Expeditions (Jim Orava et Corinne Stoltz) pour l’aider à mettre l’accent sur le développement communautaire, les voies d’approvisionnement et la communication. Il s’inspire de personnes telles que Rob Frew, Mikey Mann et Tony Evans pour faire la promotion de ce style de vie auprès de ses élèves et en soutien à ses exigences liées au tandem. Ensemble, ils organisent un cours P1 qui se déroule pendant un long weekend de camping, où les apprentissages autour du feu sont nombreux après une longue journée d’expérience ». Guy travaille aussi avec des pilotes comme Randy Parkin et l’équipe de Mount 7 de Golden (C-.B.) pour promouvoir, coordonner et appuyer des événements comme les championnats nationaux canadiens, tout en gardant le contact et en travaillant à changer le sport d’un environnement ultra compétitif à une atmosphère plus saine et axée sur la collaboration.

Ça explique peut-être pourquoi on s’entend si bien!

« Bâtir une communauté, c’est beaucoup de travail. Quand j’ai commencé comme élève, je tenais tout ça pour acquis : tout le travail qui se fait en coulisses, comme les conseils d’administration, l’obtention et le maintien des ententes avec les propriétaires fonciers, la réponse aux plaintes. » Tous ces éléments sont aussi une source de motivation pour Guy; il travaille sans cesse à améliorer les relations, notamment avec Beer Farmers (Miller Farm) pour utiliser des sites d’atterrissage et développer de nouveaux sites de décollage (vers l’Est!).

Au départ, il n’a pas été facile de s’intégrer à une collectivité tissée serrée comme Pemberton. « Comme étranger, il m’a fallu des années pour faire mes preuves. Je crois en ma communauté et j’ai travaillé fort pour le prouver. Après avoir fait de longs vols (en toute sécurité), des années à démarrer l’école, conduire la navette et coordonner les championnats nationaux, je me sens désormais bien intégré… Mais je n’ai pas fini, dit-il en souriant.

Il faut faire comprendre aux nouveaux élèves la valeur et l’étiquette de notre sport. Quand j’ai commencé, si vous m’aviez dit que je ferais tout ça, je vous aurais dit que vous êtes fou. » Comme bien d’autres, Guy est la preuve qu’on ne sait jamais où le parapente va nous emmener.

Quel est ton quasi-accident préféré, et comment a-t-il changé ton approche du vol libre?

« Je ne sais pas si un quasi-accident préféré est un concept qui existe vraiment… Personne ne les aime. Mais tout le monde en vit, cependant. » Guy se souvient de deux événements dans la vallée : « dans un cas, c’est un déploiement du parachute de réserve à la hauteur de la cime des arbres pendant une vrille, et dans l’autre, une cravate asymétrique à environ 30 km dans le bassin de la rivière Ryan, en suivant Igor. »

Je n’ai pas pu m’empêcher de rire ici… Nous avons tous essayé de suivre Igor.

Le conseil de Guy consiste à « rédiger le rapport, l’analyser et en discuter à fond. J’en parle encore de nos jours. Cette vrille a été l’un des moments les plus terrifiants de ma vie. Mon aile était à la même hauteur que moi, pointée vers le sol à la hauteur de la cime des arbres. Le parachute de réserve a fonctionné! Il n’est jamais trop tard pour le déployer. Si vous êtes encore dans les airs, vous avez le temps de l’ouvrir. »  Il rappelle l’importance de garder son jugement et de réfléchir logiquement et avec assurance. « Il ne faut pas réagir avec excès, dit-il. C’est une question d’équilibre : il faut analyser la situation et y réagir avec une force opposée équivalente. Si vous perdez le contrôle, vous devez le reprendre. Si vous avez de l’altitude, vous avez le temps. Réfléchissez. »

Selon lui, plus important encore, la leçon consiste à ne pas être gêné, mais plutôt à partager votre histoire, afin que les autres puissent apprendre tout comme vous.

Parle-moi de ta routine avant le décollage.

« Trouvez un système et suivez-le. » Guy me fait remarquer que la plupart des instructeurs favorisent une approche systématique similaire. « Commencez par vos orteils en allant vers le haut, comptez à voix haute si ça vous aide. » Il reconnaît que si on change son système, on peut changer sa routine. « Il n’y a rien comme donner de l’instruction pour s’assurer que notre routine est au point : on répète les mêmes étapes des centaines de fois chaque année! »

Avant quoi que ce soit, réfléchissez. À votre arrivée sur le site, « déposez votre sac et observez. Si les conditions correspondent aux prévisions de la veille, vous pouvez commencer votre routine prévol. »  Il croit fermement à la nécessité d’être bien informé avant de voler.

Auparavant, Guy avait comme habitude de fournir un exposé météo le matin à ses élèves et à ses collègues, mais il a découvert qu’ils s’y fiaient un peu trop. « Ils ont arrêté de vérifier par eux-mêmes! » Il a donc arrêté et a enseigné la difficile leçon consistant à apprendre par soi-même comme pilote. Il est bien sûr toujours présent et informé, pour confirmer et remettre en question les hypothèses. Il n’hésite jamais à verbaliser ses observations.

« Hey Kaylyn! », m’a-t-il lancé lors d’une journée de compétition particulièrement difficile. « Tu entends les arbres à droite? » J’ai noté mon observation et lui ai dit que j’étais d’accord. « Sur ce site, ça signifie habituellement pas mal de plaisir si tu te lances. » Il m’a gentiment et calmement offert cette information et avait totalement raison.

Que fais-tu pour améliorer tes connaissances? De qui apprends-tu? Des lectures à recommander?

« LES COMPÉTITIONS! » Guy n’insistera jamais assez sur la valeur de l’apprentissage des aptitudes pour les vols de longue distance grâce aux compétitions, à l’exception peut-être d’une clinique qui porte sur ce sujet. « Il y a 100 oiseaux dans le ciel qui essaient tous de faire la même chose. » Quand il était élève, il les regardait, les suivait et analysait leurs décisions. « Ça ne signifie pas que vous allez faire une compétition, mais si vous regardez ça avec l’œil d’un élève, vous allez apprendre.

À mon étape d’apprentissage, je regarde mes élèves devant moi, je les surveille constamment et je prépare le débreffage. J’apprends vraiment beaucoup des nouveaux pilotes. Ils font des choses pour la première fois et ils sont tellement excités d’en parler! »

Guy est en train de bâtir une chaîne YouTube sur laquelle Sea to Sky offrira des ressources de formation en ligne, allant du rangement de votre aile à comment défaire une cravate.

Parlons de SIV : qui, quoi, où?

Guy est un ardent défenseur de la SIV. « Je recommande fortement de le faire dans un intervalle de 25 à 50 heures de vol, c’est l’idéal », mais il laisse l’élève décider. Au Canada, c’est difficile à cause de l’accès, mais Guy recommande de consulter une personne qui connaît bien le matériel (comme Matty Senior ou Brad Genushio) au lieu d’une personne qui ne fait pas ça souvent, voire une fois par année.

Quel est le meilleur gadget que tu as découvert récemment et qui t’aide à maintenir ton niveau de conscience en vol?

Guy s’est mis à rire. « Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas très techno. » Guy croit plutôt, au contraire, que voler sert à se débrancher. « Si on ne sait pas ce qu’on fait et que le gadget se brise, on est mal pris! »

Nous nous rejoignons sur ce point. Nous mentionnons quelques amis qui, eux aussi, croient qu’il n’y a rien comme voler sans gadgets. Sans équipement, sans appareil qui fait « bip » ou, pire encore, de sons déprimants quand on descend, on arrive quand même à trouver sa voie. « Apprenez à écouter votre aile. »

Ça me rappelle un mentor de Salt Lake qui croit que l’aile offre « toutes les connaissances qu’il nous faut ». « C’est seulement de l’information. » Je me répète cette phrase souvent, particulièrement au printemps!

Pour revenir à notre sujet, nous remarquons que les petits ajustements sont difficiles à faire. Guy aime utiliser un bon vario qui est simple et facile à lire, peu importe s’il fait un vol récréatif ou une compétition. « Le téléphone est un bon outil de secours, mais l’éblouissement est un problème. J’aime avoir un dispositif qui ne sert qu’à ça. »

Donne-nous un exemple de conseil pratique qui pourrait améliorer notre étiquette en matière de sécurité.

Intégrez le concept de « drapeau » dans vos préparations avant le vol. Réaliser qu’il y a des drapeaux rouges est important. Mais la clé est de décider ce qu’on en fait, même si ça signifie qu’on doit interrompre sa routine avant le vol. « Certains effectuent toute leur routine prévol avant de constater les problèmes sur le site de décollage. »

Les communications avec les autres pilotes représentent aussi un élément clé. « Si aucune personne qui vit dans le coin ne vole, c’est peut-être une indication… Et si je ne peux pas communiquer avec un autre pilote, particulièrement sur un site que je ne connais pas, je ne vole pas. »

En me basant sur mon expérience à Kootenay, je suis d’accord avec lui sur ce point aussi. Notre communauté ne compte pas beaucoup de pilotes, et on se retrouve souvent à voler seul. Mais je peux vous assurer que si je vole seule, il y a au moins un autre pilote assis à son bureau qui suit constamment mon vol, ne serait-ce que par envie. Il est important aussi de signaler son départ et son arrivée à quelqu’un. Trouvez-vous un ami qui reste au sol, rendez-le jaloux!

Quelle est la différence entre un bon pilote et un pilote exceptionnel?

« L’attitude ». Guy répond rapidement, presque sans réfléchir. « Plusieurs, en fait la plupart des quasi-accidents que je vois sont dus aux pilotes qui ajustent leur caméra ou leur équipement immédiatement après le décollage, ou qui essaient d’épater la galerie. Les photos et les vidéos sont magnifiques, mais certains vont trop loin pour en faire et c’est là que les erreurs surviennent. » Sa règle? Le pilotage doit passer en priorité et l’accent doit être mis sur la situation immédiate. Vous aurez plein de temps pour prendre des photos au sol ou dans des situations stables et que vous aurez eu le temps de planifier. Votre vie ne vaut pas la peine d’être mise en danger pour une belle séquence vidéo.

Est-ce qu’il y a autre chose que tu voudrais partager?

Guy conseille en terminant aux pilotes de travailler à bâtir la communauté du parapente et du deltaplane. « Il y a plein de façons de le faire. Invitez des pilotes à participer à vos aventures, joignez-vous à un club et aidez les membres du conseil d’administration quand vous le pouvez. Aidez à coordonner les événements, allez-y avec ce qui vous convient! » Il aimerait aussi que tous sachent qu’il est toujours disponible pour discuter.


Keith MacCullough

Je vous présente Keith MacCullough. Il vole avec Muller Windsports depuis 1992, où il a suivi sa formation avec Willi et Chris Muller. Keith est pilote de niveau novice en deltaplane, en plus d’être instructeur senior en parapente. Il s’occupe du côté parapente de Muller Windsport depuis 2007. Il enseigne pour cette école depuis 1994.  À titre de pilote avancé, il a représenté le Canada lors de trois championnats mondiaux de parapente et a remporté trois championnats nationaux canadiens. Keith effectue en moyenne de 100 à 150 heures de vol par année, principalement au site d’entraînement à Cochrane (Alberta), au treuil dans les plaines et passe ses étés à Golden (C.-B.). Keith a parcouru le monde pour voler avec ses amis et participer à des compétitions. Il essaie de faire de deux à trois grands voyages par an.

J’ai fait un calcul rapide et, après près de 30 ans d’expérience, cela équivaut à 3500 à 4000 heures de vol (Keith ne tient malheureusement plus de registre). Ce nombre s’ajoute aux heures de lecture, d’enseignement et de travail avec les équipes de recherche et développement de différents fabricants à l’échelle internationale.

J’ai du retard à rattraper.

Keith se tourne vers des personnes comme Will Gadd et Chris Santacroce pour obtenir du mentorat et se fie à son équipe d’instructeurs fidèles pour tenter de bâtir la communauté, soit Mark, Randy, Rick, Dan et Kyle, qui est récemment devenu un pilote de l’équipe NOVA. Keith est d’avis qu’il est très important de favoriser l’esprit d’équipe et la camaraderie, particulièrement lorsqu’on initie de nouveaux élèves au monde du parapente. Il aime toujours être dans la zone d’atterrissage lorsque de nouveaux pilotes reviennent de leur premier vol en montagne. « Ils ont les yeux ronds comme des billes! », lance-t-il en riant. « Mais la véritable récompense, c’est de regarder les pilotes prendre des décisions toujours meilleures au fil de leur carrière. Voir un pilote reconnaître que ce n’est pas son jour et repartir du site sans avoir volé, c’est secrètement très gratifiant pour moi. »

À titre personnel, Keith a des objectifs très clairs quant à sa carrière en parapente. Il tente toujours de faire un vol de 400 km au Canada, puis un 200 km de Golden à Invermere avant de faire le chemin inverse.

Souhaitons que l’année qui vient soit excitante!  (En toute sécurité, bien sûr.)

Quel est ton quasi-accident préféré, et comment a-t-il changé ton approche du vol libre?

Nous avons beaucoup ri de cette question, car j’étais là quand ce quasi-accident s’est produit. Nous nous sommes mis d’accord sur le fait qu’il faut de la patience pour récupérer. Les « mésaventures » majeures exigent qu’on soit patient avec soi-même pour se remettre en selle. Il est capable d’en rire aujourd’hui. Keith raconte les événements tels qu’il s’en souvient.

Nous étions tous sortis pour faire un vol en soirée, et les rafales ont commencé. Pour ceux qui ne connaissent pas Cochrane, ce site est reconnu pour ses rafales. Sur ce site, des vents de 35 km/h représentent de bonnes conditions pour les manœuvres au sol. Les rafales de 40 à 50 km/h peuvent cependant être problématiques.

Un de nos collègues – appelons le Jack – était au bord de la falaise et se pratiquait à garder son aile au-dessus dos à la voile, juste à côté de Keith. Fidèle à lui-même, Keith a écouté son instinct et a crié à Jack d’abandonner et de plier bagage. Lorsque Jack a rabaissé son aile, le vent a viré de 90 degrés et Keith s’est fait catapulter dans les airs à au moins 100 mètres de la plateforme, sur sa toute nouvelle aile de démonstration, une EnB qu’il voulait essayer pour la première fois.

Keith a travaillé fort et rapidement pour s’en sortir (du sol, il ressemblait à un bonhomme gonflable qui bouge devant un commerce), tandis qu’il se faisait pousser vers l’arrière en diagonale au-dessus du terrain voisin. Il s’est posé en douceur avant de se faire à nouveau propulser vers l’arrière. Il a tondu la pelouse avec ses dents sur une bonne distance (il portait heureusement un casque à visière intégrale), avant de s’immobiliser. Ceux qui le pouvaient parmi nous ont accouru à son secours. Heureusement, Keith n’avait pas de blessures graves.

Nous avons bien sûr discuté de cet événement en groupe, mais Keith a aussi passé du temps à analyser la situation de son côté. Il reconnaît que, même lorsqu’un pilote connaît son site local parfaitement bien, l’instinct joue un rôle important. À ce jour, il demeure content que ce soit lui qui ait été catapulté, et non Jack. « Certaines personnes ont juste énormément de chance et ont une capacité innée pour s’en sortir. Je n’en fais pas partie. De mon côté, ce sont les aptitudes qui me permettent de m’en sortir. Je savais qu’il fallait que je garde mon aile ouverte à tout prix, et j’ai dû utiliser tous mes outils pour rester en vol. Une personne ayant moins d’outils n’aurait peut-être pas eu le même résultat. »

Bien sûr, comme n’importe quel bon ami le ferait, il en a profité pour me demander à quand remontait la dernière fois où j’ai pratiqué les manœuvres au sol… « Pratique, pratique, pratique! ».

Merci, coach!

Parle-moi de ta routine avant le décollage.

L’aspect le plus important pour Keith consiste à observer les conditions. « La prévisibilité est la clé », dit-il. Keith regarde et écoute pendant au moins 15 minutes. Il attend un bon groupe de thermiques ayant des intervalles constants. Selon lui, si les thermiques ne sont pas assez stables pour être prédits, ils ne sont pas assez stables pour voler. « Est-ce que les conditions vont être praticables ET agréables? ». Voilà la question qu’il aime poser à ses élèves.

Si les conditions sont bonnes, Keith commence à se préparer en suivant entre autres la liste des 5 points typique.

Que fais-tu pour améliorer tes connaissances? De qui apprends-tu? Des lectures à recommander?

« Je lis tout ce qui s’écrit sur le parapente. » Il répond sans tarder. Il aime savoir ce dont les autres instructeurs parlent, et la manière dont ils en parlent. « Chacun explique et comprend les concepts à sa façon. Chacun a sa façon de voir les choses.

Je me tiens aussi avec des pilotes meilleurs que moi : c’est pour cette raison que je fais toujours de la compétition. » Keith cherche constamment à approfondir ses connaissances, et comment les traduire pour ses élèves et les situations qu’ils seront appelés à vivre. « Une partie de l’information peut être utilisée directement. L’information est parfois amusante, parfois pas. C’est important d’être fidèle à soi-même. C’est un genre de buffet d’information; les grands mentors savent aller chercher la bonne information au bon moment. »

Parlons de SIV : qui, quoi, où?

« C’est absolument une bonne idée à mettre en place, dès la première ou la deuxième année, selon l’élève. » Keith recommande de consulter un instructeur qui enseigne le SIV plus qu’une fois par mois, et plusieurs fois par année. « Ils doivent enseigner le SIV souvent et de manière uniforme. Actuellement, personne au Canada ne l’enseigne de manière assez uniforme. »

Keith a tendance à diriger ses élèves vers Bozeman Paragliding. « Andy Macrae est très calme et professionnel. »

Quel est le meilleur gadget que tu as découvert récemment et qui t’aide à maintenir ton niveau de conscience en vol?

Son nouveau gadget préféré est son Air3, tablette développée en Belgique possédant un logiciel de cartographie avec des courbes de niveau, un vario et une caméra. « C’est un appareil robuste, pas très abordable, mais ces courbes de niveau sont vraiment pratiques. Et c’est tellement clair. »

Donne-nous un exemple de conseil pratique qui pourrait améliorer notre étiquette en matière de sécurité.

Keith enseigne à ses élèves à se fier à leur esprit communautaire. Il est d’avis que le fait de s’entraider a des avantages qui dépassent l’amélioration personnelle. Sa suggestion aux pilotes  « Acceptez les conseils sans en être blessé. C’est de l’information pour votre encyclopédie. Après, il revient au pilote d’utiliser ces conseils ou non, mais le fait de les écouter vous permettra au moins d’en tenir compte. »

La communauté est un élément très important pour Keith et l’équipe de Muller. « Le vol n’est qu’une petite partie de ce que nous faisons, que ce soit à notre site local ou lorsqu’on visite d’autres sites au Canada ou à l’international. Peut-être qu’on ne va pas tous au même bar à la fin de la journée, mais on fait du covoiturage, on échange pendant qu’on attend, on partage de l’information en préparation du lendemain. » L’instruction en est le parfait exemple car, à la base, tout passe par la gestion de la communauté. « Ça nous tient à coeur. Autrement, on ne le ferait pas. »

Quelle est la différence entre un bon pilote et un pilote exceptionnel?

« La capacité de se retirer. Parfois, la décision de ne pas décoller est la meilleure aptitude qu’on puisse avoir. »

Est-ce qu’il y a autre chose que tu voudrais partager?

Voler au Canada est difficile.

« Dans la plupart des cas, voler est difficile au Canada, comparativement aux autres pays. Notre saison est courte, donc si un pilote ne voyage pas, il se passe de très longs mois entre deux saisons.  Le relief est complexe et varie énormément. Voler du côté sous le vent à Lumby est une expérience bien différente d’une journée habituelle (si ça existe) à Golden, par exemple. Au treui dans les Prairies, c’est différent. Et c’est encore différent dans l’Est. La courbe d’apprentissage est comme un bâton de hockey, même pour passer d’un site canadien à un autre. »

À ce sujet, Keith insiste sur le besoin pour les pilotes d’avoir un sentiment d’appartenance à la communauté, et de toujours entrer en contact avec la communauté locale lorsqu’ils voyagent. « L’esprit communautaire, comme il l’appelle, permet de porter attention aux conditions qui vous touchent, qui touchent votre environnement et votre équipement. Ne volez pas seul. »

« Ouais! ». J’ai contredit son affirmation, et nous avons ri tous les deux. Je vole souvent seule à mon site local. C’est une des choses que j’apprécie particulièrement de ce sport, en fait. Mais, comme je l’ai dit précédemment, mon équipe au sol me suit de près. La sécurité d’abord!